Le 9 juin 2018, cinq youtubeurs se faufilent à la faveur de la nuit dans les champs mosellans de Sarraltroff. Ils ont entre 30 et 45 ans, s’appellent Hygiène mentale, Defakator, la Tronche en biais, Un monde riant et Astronogeek et leurs chaînes cumulent plus de 1,6 million d’abonnés. Leur credo : la méthode scientifique. Leur église : le scepticisme. Ce soir de juin, ils s’apprêtent à réaliser un crop circle, ce type de motifs sculptés dans les champs de céréales, visibles depuis le ciel.
Minuit : équipés de planches de bois et de mètres ruban, la troupe couche des milliers d’épis sous l’œil attentif de trois caméras. Une heure et demie plus tard, un agroglyphe de 70 mètres émerge des blés. Le dessin attire rapidement curieux et amateurs de paranormal. Pour les exaltés du surnaturel, l’œuvre est d’origine extraterrestre, jusqu’à la publication, le 24 août, du making-of des cinq vidéastes qui enterrent la thèse «rencontre du troisième type».
Le projet est emblématique du travail des zététiciens nouvelle génération (1), adeptes du doute pensé comme outil méthodologique et utilisateurs compulsifs de Twitter. Vulgarisateurs scientifiques majoritairement autodidactes, ils tranchent avec les racines plus académiques du mouvement créé dans les années 80 par le physicien Henri Broch pour démystifier le paranormal. Affolé par la crédulité de ses étudiants, le docteur en mécanique quant